Chapitre 23 : Hopes – I’m not sweet…

Publié le par Le Hibou

 

 

     - Non B. ce n'est pas possible !

Le téléphone rouge, celui qui m'offrait un lien direct et privilégié avec l'Enfer, autrement appelé B. avait sonné dans le calme de mon appartement.

Deux jours venaient de s'écouler depuis que j'avais manqué de crever un œil à Nadar. Comme quoi il est dangereux de jouer avec les armes. Nous n'avions échangé aucune parole, on s'était juste regardé étonnés et..., je dirais, ...gênés. Il était alors reparti sans rien ajouter et je me demandais à quoi il jouait.

Les deux jours avaient été des plus tranquilles et là : coup de fil. B. se rappelait à mon bon souvenir. Il ne m'a pas félicitée pour le nettoyage. B. ne félicitait pas ; pour lui, tout est normal : il ordonne et on se soumet. En fait, B. c'est un peu Dieu mais en moins bon, quoique.... De toutes façons, il n'a pas parlé du tout du nettoyage de printemps. Sans préambule, il m'a dit qu'il avait une affaire pour moi. Je n'ai rien ajouté, ça ne sert à rien. Donc, j'ai attendu. Attendu que le nom de la personne à espionner ou à supprimer de la surface terrestre tombe. Et pour tomber, il est tombé. Le nom qu'il m'annonça remontait du passé. De si loin. D'une période que l'on m'avait obligée à rayer pour mon bien et pour le leur. C'était mon nom de famille. Il s'agissait d'un de mes oncles, pas forcément proche d'ailleurs. Mais ce nom me renvoyait tant de visages, tant de souvenirs.

- Non B. ce n'est pas possible ! Je ne peux pas !

- Tu n'as pas le choix, Lyse, répliqua B. de son éternelle voix douce.

- Mais je connais cette personne. Tu sais que je connais cette personne.

- Ce n'est pas mon problème, Lyse, mais le tien. Alors arrange-toi comme tu veux mais cet homme doit disparaître.

     B. raccrocha sans autre forme de procès. Je n'ai d'ailleurs pas eu le temps de me remettre que mon second téléphone, celui qui me reliait à ma first life sonna. C'était Saliha. Elle avait deux jours de congé et, comme elle venait de passer sa matinée à dormir, elle voulait savoir si j'étais partante pour aller m'amuser en boîte. J'avais effectivement besoin de me vider la tête et surtout j'avais un contrat à mener à bien. Cet oncle travaillait dans une boîte de nuit du côté de Paris. C'est celle que j'ai alors proposé à Saliha qui a accepté avec un enthousiasme débordant, sûrement dû à la joie de ne pas travailler. De mon côté, j'étais ravie de me retrouver avec elle, ça faisait si longtemps.... Dommage que B. m'ait confiée cette mission, quoique, j'allais faire d'une pierre deux coups.

A vingt-et-une heures j'étais chez Saliha pour une séance d'essayage dans les règles de l'art. Après un nombre impressionnant d'aller-retour dans la salle de bain pour changer de tenue, j'ai opté pour un haut décolleté et affriolant sur un jean assez simple. De son côté, mon amie avait ressorti un de ses tee-shirts fétiches et tout comme moi le portait sur un jean. Bref nous étions prêtes pour une nuit de folie. Quelques kilomètres de rails et nous étions à Paris pour les meilleures heures durant lesquelles la folie et la fête sont au rendez-vous.
     Deux heures plus tard, nous étions toujours sur la piste de danse, à faire bouger nos corps sur des musiques qui se ressemblaient toutes plus ou moins. Quelques types s'étaient rapprochés de Saliha qui pour le moment les ignorait royalement. Moi, on ne m'approchait jamais, je crois que je fais peur... Mais aujourd'hui je m'en moquais éperdument, j'avais bien d'autres problèmes.

Alors que j'en étais là de mes réflexions, un gars commençait à se faire trop pressant avec mon amie, qui se rapprocha de moi, jusqu'à ce qu'on se retrouve collées l'une à l'autre. Elle toisa alors le mec en lui disant :

- Tu vois pas que tu me déranges là ? Je suis avec ma copine !

Et pour parfaire l'annonce, elle m'embrassa dans le cou. Je suis restée un moment interdite pendant que le jeune homme éconduit disparaissait sur la piste de danse. Puis j'ai légèrement repoussé Saliha en prétextant un besoin important de menthe à l'eau. Il fallait que je m'éclaircisse les idées et un petit meurtre me ferait le plus grand bien.

J'ai alors rapidement trouvé la personne que B. voulait que je supprime. Cela m'a semblé si simple et en même temps, pendant que je cherchais un moyen discret de verser le poison dans son verre, je ne pensais plus à Saliha, ni à Nadar, ni à personne d'autre. Je me suis approchée, assez pour mettre le poison dans son alcool mais assez loin pour ne pas le toucher. Mais, là, avec toute cette foule, personne ne pouvait me repérer. Je l'ai vu boire, se raidir et tomber, emporter par la mort. C'était si simple... et étrangement, j'avais agi sans me laisser surmonter par mes sentiments... Étais-je en train de devenir insensible comme toutes les personnes qui travaillent pour B. ? D'un autre côté, si je m'étais laissée submerger par mes souvenirs je n'aurais jamais rempli ma mission et ça m'ennuyait. Il y eut un peu d'affolement dans la foule et Saliha me saisit par le bras pour nous faire sortir en décrétant que ça craignait par ici.

Dans le train, au retour, nous n'avons échangé presque aucun mot mais je ne pouvais m'empêcher de me dire que d'ordinaire Saliha n'avait pas besoin de ce genre de mise en scène pour renvoyer un prétendant dans ses pénates... . Devais-je y voir autre chose ?

 

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Publié dans Nom de Code : Chanel

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